Elections générales en Afrique du Sud : un improbable vent séparatiste au Cap

Connu sous le nom de CapeXit, en référence au retrait de la Grande-Bretagne de l’Union européenne, un petit parti milite à moins de trois mois des élections générales en Afrique du Sud pour l’indépendance de la région du Cap.

Les chances de remporter un large soutien sur cette revendication aux allures farfelues sont minces mais, selon les observateurs, elle est l’expression d’un profond malaise vis-à-vis de l’ANC au pouvoir depuis la fin de l’apartheid.

«Plus le pays va mal, plus l’idée de l’indépendance du Cap gagne en popularité», assure le leader du CapeXit, Jack Miller, 39 ans.

Quelque 27,5 millions de Sud-Africains sont appelés aux urnes le 29 mai pour renouveler leur Parlement qui désignera le prochain président. Selon les enquêtes d’opinion, le Congrès national africain (ANC) au pouvoir depuis trente ans risque de perdre sa majorité absolue pour la première fois.

Tenu responsable d’un chômage endémique (32%) et d’une pauvreté croissante, et sa réputation entachée par les affaires de corruption, le parti historique pourrait se voir contraint à former un gouvernement de coalition.

Dans la morosité ambiante, la province du Western Cape, tenue depuis quinze ans par le premier parti d’opposition (Alliance démocratique, DA) encore largement perçu comme un parti de blancs, s’est forgée une réputation de relative bonne gouvernance.

Le taux de chômage est le plus bas du pays (20%) et sur 38 municipalités classées dans la catégorie des bons élèves lors d’un récent audit, une vingtaine sont situées dans la province.

Ces dernières années, de nombreuses familles aisées, notamment blanches, ont quitté Johannesburg pour s’y installer, attirées par bien plus que les paysages époustouflants: routes sans nids-de-poule, écoles publiques mieux notées et moins de coupures d’eau comme d’électricité.

«Tambouille»

Le profil démographique est également différent. Minoritaires à l’échelle nationale, les métis désignés par le terme «coloured» hérité de l’apartheid, sont majoritaires. Les blancs sont aussi surreprésentés par rapport au reste du pays. Et les noirs, qui constituent la base de l’électorat de l’ANC, y sont minoritaires.

Un sondage l’an dernier indiquait que 68% des électeurs de la province sont favorables à un référendum sur l’indépendance et que plus de la moitié d’entre eux voteraient pour.

Le parti CapeXit reste toutefois marginal et tout en s’affirmant affranchi de toute notion raciale, elle continue à transparaître: « Nous devons nous libérer de ce gouvernement noir», lâche un militant posté au carrefour. Avant de se raviser et d’invoquer un gouvernement «corrompu».

Finalement, peu d’automobilistes s’arrêtent, certains remontant leur vitre à la vue des militants.

«Séparer le Western Cape et faire notre propre tambouille n’a aucun sens», estime Simbarashe Milos, un réceptionniste de 24 ans, qui appelle à l’union des «Africains».

Fondé en 2007, le CapeXit ne compte que deux sièges sur 231 au conseil municipal du Cap. Le mouvement a par ailleurs peiné à recueillir les 7.000 signatures nécessaires en vue des prochaines élections.

Un autre parti défendant aussi la cause indépendantiste, baptisé le Parti du référendum, a recueilli à peine plus de soutiens.

«D’un point de vue constitutionnel, ils seraient incapables d’imposer une indépendance du Western Cape même s’ils gagnaient du poids, ce qui est improbable», estime l’analyste Daniel Silke.

Les indépendantistes pourraient toutefois trouver écho à leurs aspirations dans les propositions de la DA, qui a récemment déposé un texte réclamant davantage de pouvoirs aux autorités provinciales, ce qui a provoqué la colère de l’ANC.

«Dans un pays aussi divers que le nôtre, le fédéralisme a du sens. La DA soutient cette idée dans la mesure du possible», a déclaré John Steenhuisen, chef du parti qui a formé une coalition avec une dizaine d’autres en vue des élections.

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