Près de deux-tiers des pêcheurs au Sénégal affirment gagner moins qu’il y a cinq ans, une conséquence des « pratiques non-durables » et « destructrices de l’environnement » des chalutiers de fond, selon un rapport publié jeudi par la Fondation pour la justice environnementale (EJF).
« 65% des pêcheurs interrogés par EJF (acronyme anglais de la Fondation pour la justice environnementale) ont déclaré gagner moins aujourd’hui qu’il y a cinq ans », affirme le rapport de cette organisation écologique basée à Londres.
« Au-delà des pertes de revenus, les communautés de pêche artisanale voient leurs conditions de vie se détériorer ». Par exemple, « 88% des pêcheurs, 93% des transformatrices et 100% des mareyeurs ont déclaré avoir un accès plus limité au poisson pour leur propre consommation », ajoute le document.
Le rapport s’appuie essentiellement sur des entretiens menés au Sénégal avec ces communautés entre septembre 2022 et mai 2023. Il met à l’index les chalutiers de fond dans la crise de la pêche au Sénégal.
« Les pratiques de pêche destructrices de l’environnement et non durables pratiquées par la flotte chalutière aggravent la crise du secteur de la pêche artisanale. (Les) pêcheurs artisans ont vu le volume de leurs captures diminuer considérablement et sont contraints de rivaliser » avec ces bateaux « pour des ressources qui s’amenuisent », dit ce rapport.
**En outre, les pêcheurs artisans sont confrontés aux « incursions illégales » de ces navires « dans la zone réservée à la pêche artisanale », une situation qui entraîne « la destruction fréquente des engins de pêche ».**76% des pêcheurs ont vu leurs filets ou leurs lignes endommagés par un chalutier, selon le rapport.
Les chalutiers de fond au Sénégal sont essentiellement contrôlés par des acteurs étrangers de l’Union européenne et de Chine, explique l’ONG.
Ils « approvisionnent presque exclusivement les marchés étrangers, principalement ceux de pays de l’UE. Pendant ce temps, de nombreux foyers sénégalais peinent à s’approvisionner en poisson sur les marchés locaux pour leur consommation personnelle ».
En raison notamment de la baisse de « leurs revenus, un nombre croissant » de pêcheurs « sont contraints d’émigrer à l’étranger », en Europe notamment, dans des pays comme l’Espagne où des arrivées de centaines de migrants sénégalais ont été observées ces dernières semaines.
La pêche contribue à 3,2% du produit intérieur brut et 10,2% des exportations du Sénégal, indique un rapport de 2022 du département américain de l’Agriculture.