Algérie : un colonel des services de renseignement choisit le hrig et demande l’asile en Suisse

Une désertion de poids, ou plus exactement la harga d’un haut gradé, vient de secouer les rangs des services de renseignements algériens, déjà malmenés par une instabilité si chronique qu’ils changent de patron tous les 4 ou 5 mois depuis 2020.

Ainsi, de nombreuses sources, dont certaines sont proches des services de renseignement algériens, ont confirmé qu’un colonel détaché auprès de l’ambassade d’Algérie à Rome, où il exerçait depuis cinq ans en tant que chef du bureau de sécurité, a abandonné son poste et demandé l’asile politique auprès des autorités suisses, accompagné de toute sa petite famille.

Apparemment, cet officier du renseignement, relevant aussi bien des services d’espionnage que ceux du contre-espionnage algériens, aurait reçu l’ordre de rentrer d’urgence en Algérie. Flairant probablement un mauvais sort en cas de retour dans son pays, et ce à la lumière du désordre qui prévaut au sein de «l’étable», nom par lequel le site echorouk.dz avait désigné à juste titre l’Algérie du duo Tebboune-Chengriha, le colonel Anis, alias Marwane, a finalement fait le choix de jeter le pavé à la mare en augmentant le rang des très nombreux clandestins algériens par des galonnés. 

Ancien cadre de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), où il a officié en 2019-2020 sous la direction du général Bouazza Wassini, actuellement en prison avec tous ses ex-proches collaborateurs, le colonel Marwane a clairement anticipé le risque de rejoindre ses anciens collègues de la DGSI, mais aussi les dizaines de généraux, dont d’anciens patrons des différents services de renseignements, ainsi que des centaines d’autres officiers qui leur servaient de subalternes, tous condamnés à de lourdes peines, ou, pour les plus chanceux, placés en résidence surveillée à Alger.

La semaine écoulée a vu un énième changement à la tête de la DGSI, que dirigeait depuis quelques mois un criminel de guerre et ancien fugitif en Espagne, recherché de 2015 à 2020 par la justice militaire de son pays, remplacé, dans le cafouillage le plus total, par un général du même acabit et ancien pensionnaire de la prison militaire de Blida de 2015 à 2020.

La harga du colonel Marwane a ainsi coïncidé avec le «remake», lundi dernier, images à l’appui cette fois-ci, de l’installation, annoncée deux jours plus tôt via un communiqué officiel, du général Abdelkader Aït Ouarabi, dit général Hassan, comme nouveau DGSI, en remplacement d’Abdelkader Haddad, alias Nacer El Djenn.

Le choix du colonel Marwane de fuir vers la Suisse s’explique par le fait que la justice de ce pays a reçu et traité par le passé de nombreuses plaintes contre des généraux algériens accusés de crimes de guerre et crimes contre l’humanité durant la décennie noire (1992-2002). Ce fut particulièrement le cas de feu le général Khaled Nezzar, longtemps traqué par la justice suisse et décédé quelques jours seulement avant la date fixée pour son procès. Le chef d’état-major, Saïd Chengriha, fait aussi l’objet de plaintes pour des exécutions sommaires de civils. À ce sujet, la fuite du colonel Marwane en Suisse embarrasse au plus haut point le régime d’Alger, parce qu’il peut se constituer témoin de premier ordre dans les multiples affaires en instruction, liées à des crimes de guerre et crimes contre l’humanité.

Berne en sait également un bon bout sur le degré de corruption des oligarques et généraux algériens, dont les biens mal acquis dorment dans des comptes bancaires domiciliés en Suisse.

La grande évasion des Algériens, fuyant leur pays dont ils observent, impuissants, le pillage par une nomenklatura galonnée qui l’a également transformé en une vaste prison à ciel ouvert, s’étend à tous les compartiments de la société algérienne. Qu’il s’agisse de citoyens du petit peuple bravant les vagues de l’océan pour aller à la recherche d’une vie, dans tous les cas, meilleure que celle qu’ils mènent dans leur pays, d’opposants politiques pourchassés par une répression implacable, ou même de généraux de l’armée fuyant les règlements de comptes que se livrent les mafias vert-kaki…, c’est le vide qui se crée autour du régime algérien.

Pour arrêter cette hémorragie, la junte algérienne a placé 40% de la population du pays sous le régime d’interdiction de sortie du territoire (ISTN), selon le témoignage du journaliste algérien Raouf Harzallah, lui-même frappé par cette mesure arbitraire, tout en traquant ses opposants à l’étranger en émettant à tort et à travers des mandats d’arrêt internationaux, allant même jusqu’à commettre des actes de barbouzeries et de terrorisme d’État sur le sol de pays tiers souverains.

Par Mohammed Ould Boah

Le 30/05/2025 à 08h47

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